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RIP sur la privatisation d'ADP : Gérard Larcher et Edouard Philippe osent plaider... le déni de démocratie

par Willy 22 Juin 2019, 21:31 Privatisation

 
 
 
Alors que le recueil des signatures de la pétition pour organiser un référendum contre la privatisation d'Aéroports de Paris a déjà commencé, le président du Sénat et Edouard Philippe répètent ad nauseam à quel point le RIP, expression citoyenne par excellence, leur semble... anti-démocratique.

Décidément, la pilule ne passe pas pour les adversaires du RIP. Alors qu'un aréopage d'élus d'opposition de tous bords – seul le Rassemblement national n'était pas convié - s'est réuni mercredi soir à Saint-Denis pour lancer la campagne de collecte des signatures en vue d'organiser un référendum d'initiative partagée (RIP) sur la privatisation d'Aéroport de Paris (ADP), le président LR du Sénat, Gérard Larcher, a répété ce jeudi 20 juin sur RTL, son opposition à cette procédure, qu'il perçoit comme un "détournement de démocratie représentative".

TROISIÈME TOUR

Bien que des membres de son propre parti, comme le député LR Gilles Carrez, aient assisté hier au meeting de Saint-Denis, l'élu des Yvelines, très attaché à défendre son pré carré, a martelé son argumentaire juridique, déjà déroulé dans Le Figaro début mai, lorsque le Conseil constitutionnel avait autorisé la tenue d'un RIP. "C'est exactement l'inverse de ce que souhaitait le constituant en 2008", s'est agacé ce jeudi l'élu des Yvelines. "On est rentré dans une faille du texte de 2008. Est-ce que le référendum d'initiative partagée c'est pour faire, en quelque sorte, un troisième tour après le choix de la majorité ?", s'est-il interrogé. Un troisième tour qui tire cependant sa légitimité du suffrage universel direct...

Aux yeux de Gérard Larcher, la décision des Sages, qui ont par ailleurs validé le 16 mai la loi Pacte prévoyant la privatisation d'ADP, est une atteinte à la démocratie représentative. "Je rappelle que nous sommes dans un système bicaméral, les députés l'emportent sur nous en dernière lecture pour les lois ordinaires, et voilà que ceci serait remis en cause par un référendum d'initiative partagée décidé entre le vote de la loi et sa promulgation", insiste le président de la Chambre haute.

Les adversaires d'un référendum sur ADP, dont la pétition a déjà réuni quelque 235.000 signatures, n'en finissent pas de refaire le match. Pour eux, le Conseil constitutionnel a méconnu l'esprit de la loi en autorisant ce RIP, dans la mesure où l'article 11 de la Constitution prévoit que cette procédure ne peut avoir pour objet "l’abrogation d’une disposition législative promulguée depuis moins d’un an". Une limite censée éviter qu'un référendum ne puisse défaire immédiatement ce que le Parlement a voté. Or, pour déposer la proposition de loi lançant le RIP, ses auteurs ont justement visé la fenêtre de tir entre l'adoption de la loi et sa promulgation. Le RIP contre la privatisation d'ADP ouvrirait ainsi, selon ses détracteurs, un conflit de souveraineté entre le peuple et ses représentants.

Un argument repris ad nauseam par le Premier ministre, Edouard Philippe. "Je suis partisan d’ouvrir le RIP, comme l’a souhaité le président de la République, mais ça me semble très dangereux d’opposer les souverainetés", a-t-il fait valoir auprès du Monde le 22 mai dernier. "Ce n’est pas sain quand la représentation parlementaire corrige ce qu’a voté le peuple, et inversement. Donc il faut s’assurer que le RIP reste un outil de démocratie directe et ne devienne pas un instrument de contestation du Parlement."

"UNE MINORITÉ PEUT BLOQUER"

Le chef du gouvernement, qui clamait le 11 juin dernier dans l'Hémicycle qu'"aucune élection ne fai[sait] peur aux démocrates", a pourtant expliqué dans le journal du soir vouloir éviter qu'un incident aussi fâcheux que le RIP sur Aéroports de Paris ne se reproduise : "Avec ce qui vient de se passer, une minorité peut bloquer pendant neuf mois un texte voté par la majorité, on crée un instrument de dysfonctionnement de la démocratie parlementaire, regrettait le disciple d'Alain – "droit dans ses bottes" - Juppé. Il faut faire en sorte que le RIP ne puisse pas porter sur des textes en discussion ou adoptés, ce qui était d’ailleurs l’intention du constituant de 2008."

Par ailleurs, Matignon entend, selon Le Monde, allonger la durée de la période de "non-agression" à trois ans. Plus possible de toucher à un texte dans les trois années de sa promulgation ! Ce tour de vis discret - mais certainement efficace pour que la mobilisation contre un texte tombe dans les limbes - pourrait bien intervenir en même temps que la refonte du RIP à propos duquel le président de la République a annoncé, lors de sa conférence de presse du 25 avril dernier, vouloir abaisser le seuil de déclenchement de 4,7 à un million d'électeurs.

 
 
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